Amel Bennys
Baya Mahieddine
Camille Pradon
Farah Khelil
Inji Efflatoun
Malaika Temba
Zoulikha Bouabdellah
Partis Pris et Points de Vue
Par Natasha Boas Ph.D, International Curator
La galerie Lilia Ben Salah est heureuse de présenter Partis Pris et Points de Vue (Positions and Points of View), l'exposition inaugurale de son nouvel espace situé dans le quartier Matignon à Paris. Du 8 septembre au 8 octobre 2022, l'exposition met en lumière la dynamique inscrite dans l'adn même de la galerie se présentant comme une plateforme pour des artistes transnationaux ayant une forte connexion avec le Moyen-Orient et le continent africain. La notion de transnationalité permet de comprendre le phénomène d'hybridité culturelle en mettant l'accent sur l'idée que l'art, les artistes et les histoires de l'art sont des notions connectées au-delà de leurs foyers d'origines. La fin du xxe siècle a été marquée par une certaine urgence du monde de l'art à distinguer la production artistique de la diaspora post-coloniale en faisant d'une provenance culturelle reconnaissable un critère d'authenticité. Cette exposition dessine, au contraire, des liens d'échanges et des connexions entre les cultures constitutives de notre monde contemporain qui peut être considéré comme appartenant à un « club international » de représentations « transpectives » (trans et perspectives), voyageant au-delà des capitaux culturels locaux, des milieux ethnoculturels et des fluctuations politiques. La motivation première de l'exposition est de célébrer l'engagement, l'imagination et la multiplicité des voix provenant de lieux et de contextes interculturels et cosmopolites. Partis Pris et Points de Vue encourage au dialogue et à la transmissibilité des arts et des idées.
La sélection des œuvres des sept artistes transnationales présentées dans cette exposition de groupe rassemble une variété de médiums et de pratiques liés à la peinture et révèle le pouvoir de la ligne, de la couleur et de la forme, utilisé comme réponse aux préoccupations du monde réel -qu'elles soient politiques, spirituelles, liées aux luttes pour les droits des femmes ou à la crise environnementale- et aux questions ontologiques autour de la peinture elle-même.
Partis Pris et Points de Vue prend racine dans l'œuvre de deux artistes pionnières du modernisme, Inji Efflatoun et Baya, respectivement originaires d'Égypte et d'Algérie. Les expériences de vie et les pratiques picturales de ces deux peintres historiques sont fondatrices pour les cinq artistes contemporaines que Lilia Ben Salah a choisi de montrer à leurs côtés. L'exposition présente ainsi les peintures et sculptures abstraites de l'artiste franco-tunisienne Amel Bennys; les multi-medias et techniques mixtes de l'artiste Zoulikha Bouabdellah, franco-algérienne née en Russie ; les constructions conceptuelles de Farah Khelil, née à Carthage et basée à Paris ; les tissages et textiles de Malaika Temba, new-yorkaise d'origine tanzano-américaine et les photographies à la texture picturale de Camille Pradon, travaillant entre Paris et Tunis.
Formée à la Rhode Island School of Design et basée à New-York, Malaika Temba incarne la nature-même de ce groupe d'artistes -ayant grandi en Afrique du Sud, en Ouganda, au Maroc et en Arabie-Saoudite, son travail se nourrit de cette identité culturelle plurielle. « Je ressens une affluence de perspectives culturelles diverses en moi et utilise différentes lentilles pour les révéler dans mon quotidien en fonction de mes projets », confie-t-elle. C'est exactement ce à quoi Lilia Ben Salah aspire avec sa nouvelle galerie parisienne -convoquer, réunir et célébrer différents partis pris et points de vue.
Traduit de l'anglais par Benjamin Carteret
Pour Lilia Ben Salah l'ouverture d'une galerie à Paris procède d'un cheminement personnel qui vient croiser la programmation artistique qu'elle souhaite y déployer sur la scène de l'art contemporain. Une volonté qui s'est affirmée avec le temps pour cette professionnelle à l'existence cosmopolite, aujourd'hui riche de 20 années d'expérience en tant que galeriste à Tunis et depuis 2015 à Dubaï.
Le choix de Paris pour mettre en œuvre une nouvelle aventure artistique est évidemment lié à la position qu'occupe la métropole dans la dynamique de l'art contemporain international. Capable de se réinventer, cette place est également marquée par l'héritage du Siècle des Lumières et où le croisement des cultures et des pratiques artistiques attisent naturellement la curiosité et l'implication des publics. Mais la charge positive de cette cité raisonne de manière peut-être encore plus intime pour cette petite-fille d'une Parisienne, qui n'a eu de cesse d'y revenir pour se ressourcer, entre des séjours qui l'ont guidé vers la Suisse, le Kenya, la Cote d'Ivoire, la Tunisie, les Emirats Arabes Unis ou encore les Etats-Unis. Aujourd'hui, Lilia Ben Salah affirme cette volonté clair et franche de faire corps avec le paysage - et les codes - de l'art parisien et français, tout en affirmant son point de vue et ses partis-pris !
Tout au long de sa carrière artistique, la galeriste a côtoyé des artistes, émergents comme confirmés, dont les parcours de vie les ont conduit eux aussi, à se déplacer, à se poser un temps dans un lieu, puis de nouveau à partir vers d'autres horizons. Ces mouvements, choisis ou imposés, les ont incités à s'affranchir des différences culturelles qui leur ont permis de nourrir avec intelligence un métissage devenu une source d'inspiration et, finalement, la vraie richesse de leur pratique.
À travers sa programmation, Lilia Ben Salah aspire à se faire le relai de ces expressions libres et sans concession qui participent à l'hybridation culturelle si essentielle au développement des sociétés. Une manière de poursuivre le travail qu'elle mène depuis désormais deux décennies : Soutenir les artistes auxquels elle croit et travailler avec eux en étroite collaboration, inviter des curateurs à concevoir des projets, se rapprocher des acteurs institutionnels, mais plus encore montrer et partager ce qu'elle aime.
Il ne s'agit pas pour Lilia Ben Salah de s'enfermer dans une spécificité territoriale mais plutôt d'avoir le juste recul pour promouvoir la grande diversité de pratiques et de points de vue de ces artistes aguerris aux fluctuations éco-culturo-politiques du monde actuel. Une mission que la galeriste entend également mener à travers une présence dans les foires internationales ainsi qu'en développant des projets hors les murs.
En outre, elle souhaite offrir une autre lecture de l'histoire de l'art des dernières décennies en reconsidérant la portée du travail d'artistes plus historiques, originaires d'Afrique ainsi que du Moyen et Proche-Orient, en les présentant cette fois-ci en dehors de leur contexte géographique.
Trop longtemps, le marché de l'art et la critique internationale ont négligé l'apport de ces scènes artistiques, et de leurs protagonistes, dans leur influence sur les scènes occidentales. L'implantation dans le quartier de l'avenue Matignon est à ce titre un emplacement de référence pour un public international de collectionneurs et d'institutionnels de l'art pour qui Paris est un repère incontournable.
